Deux lois pour une fuite en avant

Deux lois pour une fuite en avant

Le tigre, ce félin menacé de disparition, continue d’être chassé par les braconniers. La solution pour protéger l’animal, plutôt que d’empêcher les chasseurs d’agir en toute impunité, consiste à apprendre au tigre à courir plus vite! C’est ce que Jacques Cornet, orateur des Assises romandes de l’Education de 2006, appelait le syndrome du tigre. Plutôt que de vouloir agir à la racine du problème, on imagine des solutions de surface qui ressemblent furieusement à une fuite en avant. 

C’est l’impression que nous donnent deux objets soumis au vote le 28 novembre prochain. Il s’agit de la loi sur l’accueil à journée continue et de la loi sur les heures d’ouverture des magasins, permettant aux commerces d’accueillir les clients plus longtemps. La SPG, lors de sa première assemblée des délégués de l’année scolaire, s’est positionnée contre ces deux lois. De nombreux collègues ont pu expérimenter la disponibilité amoindrie des parents, accaparés par leur vie professionnelle. Ils sont moins présents notamment parce que leurs conditions de travail se dégradent, lentement et imperceptiblement, mais néanmoins de façon bien réelle. Les parents doivent aujourd’hui travailler les deux pour faire bouillir la marmite de la maisonnée. Le temps de présence des uns pour les autres au sein de la famille se réduit d’autant. Les parents fatigués peinent souvent à venir à l’école pour répondre aux sollicitations des enseignants. Les plages où ils peuvent encore caser un moment se font rares et il n’est pas toujours aisé de trouver un espace de rendez-vous pour les accueillir dans de bonnes conditions pour leur présenter le travail scolaire de leur enfant. Quand ils arrivent après le travail, ils ont la tête prise par la journée qu’ils viennent de vivre. C’est un vrai problème pour les relations entre les familles et l’école. La recherche a pourtant démontré à quel point il est essentiel qu’une bonne collaboration s’instaure entre ces deux mondes qui se côtoient et prennent en charge la même personne, à savoir l’enfant- élève. Quand tous agissent de concert dans l’intérêt de l’enfant, un encadrement efficace des adultes de référence se met en place, gage de réussite scolaire important. La loi pour une ouverture prolongée des magasins équivaut à rendre encore plus exploitables les travailleurs (nos parents d’élèves) du secteur de la vente. Cela va réduire d’autant leur disponibilité, pour leur famille d’abord et pour des rendez-vous avec l’école ensuite. Les enseignants encouragent souvent les parents à prendre du temps avec leurs enfants pour des sorties, pour stimuler leur curiosité ou lire des ouvrages en français ou dans leur langue maternelle, pour leur montrer l’importance de la lecture et leur donner envie d’en découvrir tous les arcanes. Ces activités demandent des moments de loisirs pour les enfants et leurs parents. Cette loi va immanquablement réduire ce temps si précieux. 

La loi pour l’accueil à journée continue vient renforcer ce phénomène en proposant d’étendre les infrastructures d’accueil des élèves, pourtant déjà importantes à Genève. C’est le principe du syndrome du tigre: plutôt que de contenir cette offre pour inciter les familles à trouver d’autres solutions, on l’étend encore pour répondre à une demande en constante augmentation. Bien sûr que cette loi pourra arranger bien des personnes pour lesquelles la garde des enfants peut s’avérer un véritable casse-tête; on pense par exemple aux familles monoparentales, nombreuses dans notre canton. Mais on organise une forme de fuite en avant: l’école propose une structure de garde des enfants parce que cela arrange les parents qui travaillent, et quand ils ont besoin de plus de temps de travail pour répondre aux demandes de l’économie, on étend l’offre de garde des enfants. Et donc, sous couvert de répondre à un besoin des familles, on renforce la fonction cachée de garde de l’école parce que l’économie le demande. C’est pour ces raisons que la SPG recommande à ses membres de voter NON à ces deux lois et d’inciter d’autres à le faire, pour préserver les précieux liens entre les familles et l’école qui ne cessent d’être fragilisés.

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