Intérêt international sur les questions de développement et de prospective en éducation

Les questions du Livre blanc du SER en 2011 recoupent depuis plusieurs décennies celles de la recherche internationale ; elles portent sur un certain nombre de problématiques relatives au changement des organisations scolaires et à l’accompagnement des professionnel·les de l’éducation, à partir de multiples expériences, innovations, et expérimentations mises en œuvre à travers le monde. Cela a donné lieu à des politiques publiques, par exemple au Royaume-Uni pour accompagner chaque école ; le bestseller s’intitule Every school a good school.

Inertie des systèmes éducatifs et difficulté de l’évaluation, errance de la prospective

Dans le même temps, Andy Hargreaves et Dennis Shirley, dans un rapport du Boston College, intitulé La face cachée de la réforme de l’éducation, pointaient la difficulté des professionnel·les : « ils essayaient de donner de la valeur à ce qu’ils mesuraient au lieu de mesurer ce à quoi ils donnaient de la valeur. »

Intelligence des acteurs des questions complexes par l’approche métaphorique

Dans tous les pays, améliorer l’éducation et les apprentissages pour nos jeunes semble résister aux politiques de réformes. S’il peut exister des prescriptions intelligentes, cela nécessite vraisemblablement une intelligence de la prescription ; rien ne se fera sans les acteurs eux-mêmes. La transformation de l’école, c’est un peu comme le développement durable  « penser global, agir local ». La complexité et la systémicité de notre éducation sollicitent de notre part des médias et souvent des métaphores pour que les professionnel·les s’en saisissent. Le Livre blanc avançait en 2011 des images, sans pour autant les exploiter. Je vous propose d’aller plus loin dans la démarche.

Les vecteurs de la transformation de l’école

Un de nos ouvrages identifie explicitement cinq vecteurs de transformation à bas bruit de l’école.

La considération positive de l’élève et la dimension éthique du métier

« Lire » le tableau la Grande Vague ¹ renvoie à la question de point de vue, selon que vous vous placez dans la barque des pêcheurs, ou sur la crête de la vague, ou encore au sommet du mont Fuji. Pour un même phénomène dynamique, les perceptions des acteurs seront différentes, voire contradictoires.

Traduction : transformer l’école, c’est d’abord permettre aux équipes éducatives de refocaliser leur vision, leur attention, leur énergie et leurs analyses sur les élèves, tous·tes les élèves ; et non sur les conditions de travail, les réformes ou les programmes ou leur statut.

L’amélioration des apprentissages, la valorisation des progrès et le développement des compétences des élèves

L’Arbre de vie ¹ trouve sa transposition classique dans l’arbre des compétences, pratique connue dans l’éducation ; comment un groupe peut formaliser ce qu’il a appris ensemble, dans une arborescence évolutive et toujours riche.

Traduction : alors que les équipes se trouvent souvent gênées dans des pratiques d’évaluation des apprentissages, il devient décisif de les engager dans des pratiques et dispositifs d’évaluation POUR les apprentissages ; par exemple, accentuer explicitement les retours d’information, l’auto-évaluation, la coévaluation, l’explicitation des consignes, dans la quotidienneté de la classe.

Le développement professionnel des enseignant·es

Les Ménines ¹ n’ont pas forcément comme objet principal et central l’Infante d’Espagne ; le décodage de l’œuvre montre l’entrelac des regards et l’implication de chaque acteur dans une interaction.

Traduction : Refocaliser sur les apprentissages des élèves entraine des dispositifs d’observation et d’analyse de la situation professionnelle : lesson studies, analyse de pratique, extériorité de l’accompagnement, coopération des professionnels.

Les changements dans l’organisation du travail

Le « trouble » ¹ en 1917 évoque la désorganisation d’un ordre structuré autant que la recomposition des pouvoirs.

Traduction : le système éducatif apparait moins comme système que comme un univers parfois entropique qui génère ses propres zones de créativité aussi. Tenter de faire mieux sans à un moment songer à « pousser les murs » pourrait s’avérer épuisant et inutile à terme. L’emploi du temps emploie du temps. Considérer l’ordre dans lequel nous faisons les choses peut changer les choses aussi.

Le partage des rôles et des responsabilités dans l’équipe (leadership scolaire)

La Ronde de nuit ¹ témoigne de la mobilisation des acteurs urbains pour sauver la cité et exprimer un nouveau pouvoir.

Traduction : il est stratégique de permettre aux professionnel·les de s’organiser en équipe, répartissant rôles et responsabilités, dépassant l’égalitarisme statutaire par ailleurs, pour envisager les rôles fonctionnels et encadrant les jeunes. La qualité de la formation est forcément collective.

Un « Miroir des pratiques » ou tableau de bord pour votre école

Le tableau de bord ² apparait alors comme un écosystème, dynamique, évolutif, en rapport étroit avec les données externes de l’environnement ( la récente crise sanitaire par exemple ). En tant que vecteur, chacun·e peut être gradué·e de 1 à 5, en fonction du contexte, de l’état des pratiques et des routines scolaires ; dans cette échelle, il peut apparaitre alors des effets de seuils ; en deçà, les transformations se passent à bas bruit ; au-delà, elles nécessitent des aménagements et cela impacte les autres domaines.

Une carte de navigation professionnelle pour les équipes

L’arbre du développement prend de la même manière une nouvelle forme, en carte heuristique ; elle a été construite à partir de l’analyse de plusieurs centaines d’équipes sur le terrain, et de l’identification des actes professionnels de ceux qui disent que « cela change ». •

¹ Les visuels et les liens de la mini-conférence sont disponibles sur le MURAL https://app.mural.co/t/muraldefrancois7982/m/muraldefrancois7982/1654617526619/03af290700008e27fdc5f3541853e5b6e1dab40e?sender=fmullewh3105

² À voir ici: