Le bon prof

Le bon prof

 

L’enseignant* appartient à cette catégorie de professions soumises à l’oeil examinateur et critique du public. Il passe en effet une majeure partie de son temps de travail face à un public, les élèves. Si l’estrade a disparu des salles, il n’en demeure pas moins sur le devant de la scène, tenant un rôle multiple et complexe. Il doit instruire, veiller à créer et entretenir une dynamique au sein du groupe, il contrôle les travaux réalisés par les élèves, évalue leurs connaissances, etc. Tous ou presque s’acquittent de ces tâches avec sérieux et compétence. Qu’est-ce qui fait dès lors qu’un enseignant est perçu comme un bon prof? Que dit le public? 

Au début de l’année scolaire, les élèves se posent invariablement les mêmes questions: «C’est qui ton titulaire? T’as qui pour l’allemand? Et pour les maths? Et pour le dessin?» Et cætera. Les réponses suscitent des réactions promptes et attendues: «T’as de la chance, lui, il est cool.» Pour un autre: «Ah, lui, il est pire sévère!» Des réactions d’ordre émotionnel plutôt, surtout au temps de l’adolescence. On juge sur le ressenti. Nombreux sont cependant ceux qui se préoccupent du savoir qui leur est transmis. Un bon prof est alors celui avec lequel ils apprennent beaucoup. Au fil des années, j’ai noté chez beaucoup d’élèves cette attitude paradoxale: l’enseignant doit être sympa, cool, proche des élèves, mais ces derniers n’hésiteront pas à le brocarder sèchement s’il se trouve débordé dans la gestion disciplinaire du groupe, s’il ne se montre pas assez exigeant sur la qualité des travaux à réaliser, sur les connaissances à assimiler. Dur, dur d’être un bon prof pour ces jeunes qui ne réagissent pas toujours bien à l’autorité, mais néanmoins en quête de limites, de cadre, de savoir. Des jeunes qui réalisent après coup l’importance des limites et exigences posées. On loue un jour le prof cool, le prof avec lequel on a bien rigolé, on le descend en flèche le lendemain car «on n’a rien foutu avec lui». Le public est ingrat. Il renferme en lui tout ce que l’être humain a d’antagonisme. On a connu des enseignants qui ont résolu le problème en misant tout sur l’autoritarisme. Ils ont adopté la devise de l’empereur Caligula: oderint, dum metuant. ** Contact visuel à la Clint Eastwood, paroles très directes, encouragements physiques. L’époque le permettait. Les parents approuvaient. Ils étaient durs, on les qualifiait volontiers de bons profs. Il est vrai qu’on apprenait bien avec eux. On avait tout intérêt à bien apprendre, sinon on copiait dix fois la leçon.

Les temps ont changé et c’est plutôt bien, même si ça n’a pas simplifié les choses. Aujourd’hui, la situation est différente, plus complexe. La société a évolué, ne cesse d’évoluer et rapidement. Le bon prof doit être psychologue, souple, mais ferme et très clair dans ses exigences. Il doit maintenant, à mon avis, tenir un peu plus du roseau que du chêne de La Fontaine. Une question de santé! Il doit en effet rester en bonne forme physique, surtout quand il a une pleine journée de cours. Il ne doit pas négliger l’expérience de ses collègues. On apprend beaucoup au contact des autres enseignants, en discutant, en observant aussi. Les enseignants qui ont un stagiaire savent combien on apprend en observant, assis au fond de la classe. Le bon prof sait qu’il doit composer avec ses imperfections, ses doutes et ses erreurs. Il sait aussi qu’il ne doit cesser de chercher à s’améliorer, d’élargir le champ de ses connaissances académiques, de perfectionner la qualité de ses ressources documentaires, d’explorer de nouvelles approches didactiques. Personne ne pourra alors dire de lui qu’il est un mauvais prof. Et lui, il pourra continuer de changer la vie, comme dans la chanson de Jean-Jacques Goldman.

 

* L’usage du masculin vise à faciliter la lisibilité et englobe naturellement enseignantes et enseignants. 2

** Qu’ils me haïssent, pourvu qu’ils me craignent.

 

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