Sauvez Billy !

Sauvez Billy !

 L’affaire a notamment été révélée par un article récent de la revue The Economist . Face à la raréfaction du livre et à son remplacement par le e-booking, la firme IKEA délaisserait sa mythique étagère Billy au profit d’une nouvelle version plus profonde, utile et nécessaire à loger en particulier un écran plat.

«Ma crainte, c’est que ce ne soit pas seulement la disparition d’un objet, mais aussi la disparition de ce qui allait avec, le silence, le temps, la solitude, la longue histoire du roman. Prendre son temps pour rentrer dans le cerveau de quelqu’un d’autre», voilà ce que dit Frédéric Beigbeder du livre numérique. Au cours des cinq premiers mois de cette année, le niveau de vente des livres numérisés aux USA semble avoir dépassé celui des livres traditionnels. L’entreprise de vente en ligne Amazon vend désormais plus d’e-books que de livres papier. Pas de gestion de stocks, ni de question de tirage. Tout bénéf pour les éditeurs. Tout bénéf à ce jour pour Amazon, omnipotent sur le marché. Tout bénéf aussi – à quelque chose malheur est bon – pour la forêt, estimeront les «développementdurablistes »… Conséquence inattendue, IKEA estime que la mythique bibliothèque Billy – dont le cinquantenaire fut pourtant fêté en grande pompe tout récemment – n’aurait plus de clientèle potentielle, si ce n’est pour les aficionados qui désireraient pouvoir continuer à y déposer quelques bibelots et un ou deux livres d’art. Le géant suédois semble avoir toujours par ailleurs considéré le livre en premier lieu comme un objet de décoration! Dans ce contexte de mise en désuétude désormais effective du livre traditionnel, le gouvernement japonais a lancé un projet d’«école du futur» qui permet aux élèves de faire leurs devoirs sur un écran tactile, tandis que l’enseignant donne son cours à l’aide d’un tableau électronique interactif. En Corée du Sud, les écoles sont toutes équipées de zones Wi-Fi, les manuels scolaires manuels sont désormais formatés «tablette» depuis 2007 et, si les tests s’avèrent probants, le gouvernement pourrait décider en 2012 de faire basculer l’ensemble des élèves dans le tout-numérique. Ici, plusieurs classes sont désormais équipées de tableaux interractifs et les responsables scolaires s’interrogent: de compléments, les ressources numériques deviendront-elles dans un futur proche la seule référence, certaines maisons d’édition proposant dès maintenant des ouvrages informatisés interractifs, à des prix défiant toute concurrence – on parle d’à peine plus d’un euro par élève pour un ouvrage de 150 pages? Que saint Johannes Gensfleisch zur Laden zum Gutenberg voile de parchemin sa pudeur! Voilà donc où nous sommes rendus. Pour le reste, plus sérieusement, il est plus que temps que cette question astique les neurones des enseignants ou, à tout le moins, ceux des dirigeants de leurs associations professionnelles. Sans tabous, mais aussi sans concessions. Nous ne saurions par essence être sauriens primaires; quand bien même certains d’entre nous jettent toujours sur les ordinateurs portables un oeil mauvais, considèrent les tablettes numériques comme des objets diaboliques et menaçants et militent pour que le papier-crayon demeure la borne ultime de l’intrusion du monde dans la classe. Cependant, nous ne saurions non plus accepter que des orientations et des décisions du type sudcoréens ne soient prises avant que les conséquences n’en puissent être documentées et mesurées. Quels coûts? Quels transferts de coût? Et vers qui? Quel contrôle et par qui sur les contenus, sur la diffusion de ceux-ci? Quelles conséquences sur le temps consacré au travail par les enseignants, les élèves et leur famille? Mais aussi, et surtout, quelles modifications des approches pédagogiques, des pratiques et de l’organisation des tâches, cette potentielle révolution porte-t-elle en son sein? Voilà qui doit très vite être empoigné, à l’interne et avec les décideurs. Pour l’heure, et même si Santa Klaus déposait ses kindles au pied du sapin, il convient de militer pour sauver Billy, afin que nos espaces puissent toujours être décorés de ces antiquités riantes que seront bientôt les livres en papier.

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