Fonctionnant sous l’égide de l’EPFL, le LEARN est un centre pour les sciences et l’apprentissage. Depuis 2020, il assurait la formation des quelque quatre-vingt personnes-ressources et des autres enseignant·es formateur·trices pour les cycles 1 et 2 des établissements scolaires, désigné·es pour assurer le déploiement du projet EduNum du département. Le LEARN s’est ainsi occupé de la formation, du pilotage et de la première phase du déploiement EduNum. Au 1er janvier 2023, c’est la HEP qui assurera la suite de la formation. Annonces faites, difficile de connaitre les raisons de la mutation. Alex ¹ est chargé de mission au LEARN : « Avant, je concevais beaucoup de formations. Aujourd’hui on doit transmettre tous les documents, les supports, les statistiques à la HEP. » Interview.

Que retiens-tu de cette expérience au LEARN ?

Alex : C’est d’abord la complexité de la mise en œuvre de la formation avec les compromis à faire. Nous avons pris au maximum les besoins en considération, mais ce sont les communes qui prennent les décisions d’achats de matériel, notamment en termes de délais d’achats, ce qui fait que tout le monde n’est pas forcément équipé au même moment.

Ensuite, globalement, développer une optique EduNum permet de voir le numérique autrement que par l’utilisation d’un ordinateur. Ça permet de saisir l’objet dans son environnement socio-technique et à travers des enjeux plus politiques.

Enfin, certaines personnes pensent parfois rapidement que les écrans incarnent « le mal » et qu’ils n’ont pas leur place à l’école. Mais de mon point de vue, il faut comprendre le fonctionnement de l’objet et comment la société en fait usage ( par exemple comment les algorithmes des réseaux sont construits ou les moteurs de recherche fonctionnent ) pour pouvoir argumenter pour ou contre les écrans et questionner vraiment les inquiétudes. Les écrans restent des outils et c’est ce qu’on en fait qui compte. Il est arrivé que les enseignant·es, en particulier dans les degrés 1-4, s’arrêtent à l’utilisation de la machine, mais il est important de penser toute la scolarité et d’offrir des connaissances approfondies aux professionnel·les pour qu’ils et elles puissent agir en classe. En 1-4, on travaille principalement de façon débranchée ( sans recours aux écrans ). Cette formation offre des éléments tangibles.

Quels conseils donnerais-tu aux futur·es intervenant·es de la HEP ?

Il s’agit de créer une culture commune. Il faudrait penser la formation par bâtiment et pas seulement par établissement ou par individu. Les jeunes qui sortent de la formation initiale doivent aussi pouvoir s’intégrer. Il faut penser leur place dans la formation EduNum, car certain·es ont un train d’avance et il y a là des potentiels de collaboration, des dimensions d’entraide à développer.

Aussi, il faudrait offrir moins de présentations magistrales ou sensibilisations et plus de mises en pratique, ou alors répartir les contenus différemment. Sur une journée, il y a trop à intégrer.

Actuellement la formation pensée au sein du LEARN n’est pas toujours conçue par des professionnel·les de l’enseignement. L’alignement curriculaire, les compétences et visées finales restent à revoir. Pour moi, il ne s’agit pas simplement de sensibiliser ou de dire ce qu’il faut faire, on devrait pouvoir certifier que les personnes formées soient en mesure d’agir, de mettre à l’œuvre. Il s’agirait enfin d’adopter une vision longitudinale et de pouvoir accompagner les gens sur leur terrain après la formation initiale. Deux périodes de décharges actuelles sont insuffisantes pour les personnes-ressources, pour qu’elles se sentent véritablement des ressources ! 

Sandrine Breithaupt

¹ Prénom d’emprunt