VD : Violences et harcèlement-intimidation entre élèves – Des retours terrain à la consolidation du dispositif vaudois - 06/2024

VD : Violences et harcèlement-intimidation entre élèves – Des retours terrain à la consolidation du dispositif vaudois

Violences et harcèlement-intimidation entre élèves

Des retours terrain à la consolidation du dispositif vaudois

 

Dans la suite des numéros d’octobre 2023 et de mars 2024, cet article fait le point sur le dispositif cantonal de prévention et de prise en charge des situations de harcèlement-intimidation entre élèves, déployé depuis 2015 dans le canton de Vaud. Les données issues d’un bilan réalisé il y a une année auprès des équipes MPP (méthode de la préoccupation partagée) permettent de mettre en évidence les défis et leviers à la mise en œuvre de la MPP et de faire émerger des pistes d’action.

 

 

En guise d’introduction, il convient de rappeler que les phénomènes de harcèlement-intimidation entre élèves sont caractérisés par la répétition et l’effet de groupe. La plupart du temps, il s’agit d’actions qui se déroulent en dehors du regard des adultes et qui sont rapportées ; il est alors risqué d’intervenir sans empirer la situation. Par ailleurs, il est essentiel de distinguer ces phénomènes d’une situation ponctuelle de violences qui se déroule sous les yeux de l’adulte et qui nécessite une intervention immédiate sur le moment ainsi qu’une sanction. En revanche, faire appel à la méthode de la préoccupation partagée (MPP) s’avère efficace – comme le montre le bilan effectué auprès des équipes MPP (ci-après) – puisqu’elle réduit les risques de représailles et de stigmatisation.

 

Méthodologie

À l’heure actuelle, le dispositif cantonal est déployé dans tous les établissements de la scolarité obligatoire et dans sept institutions de l’enseignement spécialisé, ainsi que dans 72 % de la scolarité postobligatoire 1. Dès lors, et dans le cadre de ce bilan, toutes les écoles formées ont eu l’occasion de pouvoir répondre à cette évaluation tant quantitative que qualitative.

La synthèse proposée dans cet article se base sur les cent réponses, provenant majoritairement des doyen·nes (30 %), des médiatrices et médiateurs scolaires (20 %) et des délégué·es PSPS (17 %). À noter que les équipes formées à la MPP sont coordonnées principalement par les fonctions mentionnées dans le graphique ci-contre. 2

 

Défis et leviers identifiés par le terrain

De manière générale, les défis identifiés tournent autour de deux enjeux majeurs : l’accompagnement des équipes MPP et l’investissement des professionnel·les formé·es. Pour le premier, il s’agit essentiellement de pointer la nécessité d’un suivi régulier de l’équipe MPP, notamment de mettre sur pied davantage de moments de partage au sein de l’équipe MPP. De facto, ces éléments peuvent avoir une influence sur le second enjeu, à savoir l’engagement des professionnel·les puisqu’on valoriserait ainsi le sentiment d’appartenance et de compétence. Il ressort également des difficultés à avoir suffisamment de personnes formées dans tous les degrés scolaires et sur tous les sites, à pérenniser les équipes, à reconnaitre l’investissement de celles et ceux qui s’engagent.

Enfin, une demande spécifique a émergé pour une formation à la prise en charge de l’élève-cible dans le cadre de la MPP ; cette demande a été entendue à travers la mise sur pied des sessions de formations spécifiques, à destination uniquement des personnes ressources 3 de l’école.
En termes de leviers, 100 % des répondant·es mentionnent le soutien de la direction. De plus, 93 % déclarent que la rédaction d’un protocole écrit aide la mise en œuvre de la MPP. La qualité de l’accompagnement par les cheffes de projet en charge de la thématique, tant au niveau du suivi, de leur disponibilité que de leur réactivité est soulignée. Dès octobre 2022, la mise à disposition de documents, des capsules vidéo réalisées par l’Unité PSPS, ainsi que la valorisation des évolutions sur la MPP sont indéniablement des soutiens au déploiement de la MPP. Enfin, 98 % des répondant·es relèvent la plus-value d’avoir la MPP au sein de leur école.

 

Taux d’amélioration des situations

Durant l’année scolaire 2022-2023, 88 % des situations prises en charge avec la MPP se sont améliorées. Il est intéressant de clarifier les principales raisons mobilisées par les répondant·es pour expliquer les 12 % restants. Majoritairement, trois cas de figures prépondérants ressortent. Tout d’abord, il y a des situations qui sont évaluées comme étant à priori de l’intimidation, mais qui, en cours de route, s’avèrent plus complexes et dans lesquelles des faits graves se sont déroulés (par ex : bagarres, violences sexuelles, menaces, partage non consenti de nudes) et la MPP doit être stoppée. Il arrive également que la mise en œuvre de la MPP doive être interrompue en raison par exemple d’agressions verbales ou physiques de parents envers d’autres élèves. Enfin, pour faire changer la dynamique de groupe, il est essentiel que suffisamment d’élèves soient vu·es en entretien ( élèves ayant participé à l’intimidation de près ou de loin et pas du tout ) – auquel cas, l’approche n’aura pas l’effet escompté.

De manière générale, il est essentiel de rappeler que les situations doivent être évaluées en amont à plusieurs en croisant les regards et de faire des points de situation réguliers sur la prise en charge. Si la MPP vient à devoir s’arrêter ou ne peut être mise sur pied, il est nécessaire d’analyser et de définir d’autres pistes d’action.

 

Entre constats et pistes de consolidation

Le bilan fait émerger d’autres enjeux dont celui de la communication. L’élève évolue au gré de la journée dans différents contextes et il est essentiel de sensibiliser les adultes qui gravitent autour et de communiquer sur l’existence de l’équipe MPP, afin d’assurer un langage et une approche commune.

Dans les pistes d’actions proposées par les établissements scolaires figurent plusieurs propositions : pédagogiques pour les professionnel·les ( formations, conférences, etc. ), préventives pour les élèves ( ateliers de prévention, spectacles, etc. ) et sensibilisantes pour les parents ( soirées à thème, présentations, etc. ).

 

Perspectives

En complément de ces pistes concernant le volet communication, beaucoup d’écoles rapportent mettre sur pied différentes actions auprès de plusieurs publics ( professionnel·les, parents, élèves, partenaires, commune, etc. ), afin d’informer, sensibiliser, former, promouvoir la santé et le vivre ensemble, ainsi que prévenir les violences et les discriminations. Il est essentiel de rappeler également que les écoles travaillent avec des prestataires validés par l’Unité PSPS et des partenaires institutionnels, tels que la Police, la fondation Action Innocence, etc., pour œuvrer dans le même sens.

Au-delà d’avoir un dispositif de prévention et de prise en charge des situations, la clé de voûte réside dans le repérage. Les répondante·s relèvent que la plupart des situations sont rapportées par les membres du corps enseignant, les personnes ressources et la direction. Le corps enseignant, de par sa grande proximité avec les élèves, joue un rôle primordial dans le repérage des situations et le relai vers les personnes ressources. En cas de préoccupation, il est capital de réaliser ce pivot entre l’élève et les ressources de l’école, qui finalement est du ressort de l’ensemble des membres du personnel au sein d’une école.

 

Conclusion

Ce bilan met donc en évidence l’efficacité et la plus-value de la MPP qui permet une prise en charge des situations dans un cadre établi, coordonné, soutenu par la direction et les personnes ressources ; elle se déploie dans le cadre d’un dispositif cantonal et d’une politique publique claire et cohérente, invitant les actrices et acteurs de la communauté éducative, y compris les élèves et leurs parents, à collaborer ensemble. 

 

Jennifer Dayer(-Lugon) et Sonia Lucia, cheffes de projet « Harcèlement-intimidation et violences entre élèves : prévention en milieu scolaire ». Unité de promotion de la santé et de prévention en milieu scolaire (PSPS).

 

1 Le déploiement du dispositif au niveau des établissements de la scolarité obligatoire a débuté dès 2018.
2 Certaines écoles ont plusieurs personnes à la coordination, ce qui explique que le 100 % soit dépassé.
3 Médiatrices et médiateurs scolaires, infirmières et infirmiers scolaires, éducatrices et éducateurs en milieu scolaire, psychologues scolaires, conseillères et conseillers école-famille, etc.

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