Qu’est-ce qui me fait rester ? Simplement le fait d’aimer ce que je fais, mais aussi la conviction qu’en entrant dans une salle de classe, j’ai encore de l’impact et de l’influence sur la progression des élèves. Voilà ce que j’aurais pu répondre si on m’avait posé la question.

Depuis quelques années, il faut bien avouer que le métier d’enseignant·e traverse des zones de turbulence. Entre réformes, attentes sociétales et parentales, diversité des élèves et pression du quotidien, l’enseignant·e se retrouve souvent dans une posture d’équilibriste. Pourtant, nombreux et nombreuses sont celles et ceux qui tiennent bon. Attention, il ne faudrait pas voir derrière ce propos une forme de résignation, mais plutôt ce sentiment fort qu’il existe un sens profond à ce labeur. En réalité derrière le spleen évoqué, il y a aussi une résilience admirable.
Bien plus que spectateur·trices ou témoins de l’évolution de la société, les enseignant·es sont des témoins, des artisan·nes méticuleux·euses des changements dans la société. L’intégration du numérique, l’adaptation aux besoins spécifiques, la réalisation pratique des réformes scolaires … tout cela se fait souvent certes par l’entremise de ressources constantes, mais surtout avec une capacité d’adaptation impressionnante. Et quand la frustration et le découragement pointent leur nez derrière les virages sinueux de l’éducation, la fierté de voir progresser les plus réticent·es redonne du courage.
Le temps consacré au travail réel d’enseignant·e dépasse souvent le cadre officiel.
Face à ce constat, la parole se libère, mais il convient de rappeler à tout un chacun l’intégralité, souvent méconnue, du cahier des charges d’un·e enseignant·e.
Les syndicats ne se contentent pas de dénoncer, ils proposent des outils concrets, des pistes pour réduire la charge de travail via un dialogue avec les autorités cantonales. Dans certains cantons, des avancées ont été obtenues. La réussite des un·es doit offrir des solutions aux autres.
Malgré les obstacles, la plupart des enseignant·es interrogé·es affirment qu’ils·elles ne voudraient pas exercer un autre métier. Il ne faudrait pas considérer cela comme un aveu de résignation, mais bien un attachement profond à la transmission de savoirs, aux relations humaines tissées avec les élèves, à cette possibilité de changer les choses.
Le spleen existe, bien sûr. Mais il ne résume pas toute la réalité du métier. Dans les classes romandes, il y a aussi de la créativité, de l’engagement, de l’innovation. Il y a des enseignant·es qui inventent, qui testent, qui s’ouvrent à d’autres horizons pour enrichir le leur. Et surtout, il y a des élèves qui, chaque jour, rappellent pourquoi ce métier reste l’un des plus essentiels. •
David Rey, président du SER