Les syndicats pour les jeunes, mais pas seulement ! 

De manière générale, les associations et syndicats en Suisse (comme dans d’autres pays) rencontrent souvent des difficultés à recruter de nouveaux membres, en particulier parmi les jeunes générations. 

Ce sont les grandes études européennes sur le travail, comme celles d’Eurostat et de l’OCDE, qui fournissent des statistiques comparatives, montrant une baisse de l’adhésion syndicale dans plusieurs pays européens, y compris en Suisse. 

Pour les syndicats et les associations, la spirale négative s’engage. Moins il y a de membres, moins il y a d’entrées financières et moins il y a de moyens pour s’engager pour les causes à défendre.

Pour le syndicat des enseignant·es bernois·es, Formation Berne, avec sa section francophone, le SEfFB, le résultat est le même. Il a moins de moyens à disposition bien que le nombre de syndiqué·es soit en légère hausse. Une explication tourne autour du changement de génération.

La génération des babyboomers (1945-1964) arrive à la retraite, je suis parmi les dernièr·es représentant·es de cette tranche d’âge encore active professionnellement. Une de leurs valeurs principales est le travail acharné avec en plus la stabilité ! Donc, souvent, nous travaillons à plein temps et cotisons à plein pot. 

La tranche d’âge qui suit, la génération X (1965-1980), favorise l’indépendance et la flexibilité. Elle fait le pont entre les babyboomers et les Millennial·es (1981-1995). Ces dernièr·es sont également appelé·es la génération Y. C’est la première qui a adopté massivement les nouvelles technologies. Ses représentant·es ont entre environ 28 et 43 ans aujourd’hui. On arrive à la génération Z (1996-2010), celle dans laquelle se trouvent nos tout·es jeunes collègues, à persuader que l’engagement dans un syndicat des enseignant·es porte ses fruits. Cette tranche d’âge passe pour être pragmatique, attachée à la liberté d’expression et à l’autonomie. Nous y voilà !

Le défi est de traduire le slogan « Ensemble on est plus fort » et « une association professionnelle engagée a besoin de membres engagé·es » pour une jeune génération plus encline à suivre des initiatives individuelles ou des mouvements moins institutionnalisés.  

Selon la vision des adeptes de l’astrologie, avec le changement d’ère astrologique, qui entre actuellement dans l’ère du Verseau, souvent associée à l’innovation, à l’humanitarisme et aux idéaux collectifs, la tâche devrait être facilitée de recruter de nouveaux membres. 

Certaines personnes pensent que cette période favorise l’ouverture d’esprit, le partage et les engagements sociaux. Est-ce que ces valeurs pourraient motiver les jeunes à s’impliquer pour des initiatives syndicales ? Et comment motiver les jeunes générations à s’investir pour le bien commun ? Quelles conditions favorisent leur engagement ?

Est-ce qu’il suffit vraiment de moderniser l’approche pour correspondre aux idéaux des jeunes générations ? Ou est-ce qu’une image trop négative du plus beau métier du monde circule ?

Douze cantons de Suisse ont participé à la campagne de publicité pour donner envie aux gens de coconstruire le futur de tout un pays et de devenir enseignant·e (à découvrir ici, avec les affiches créées à cette occasion).  

Les syndicats ne sont pas les seuls à être inquiets du développement de la profession enseignante. Les autorités cantonales aussi. Par exemple, le 23 octobre dernier, la COFRA, conférence de coordination francophone de la direction de l’instruction publique et de la culture du canton de Berne, a organisé une conférence avec pour thème la santé des enseignant·es (voir précédent numéro). 

Les syndicats d’enseignant·es en Suisse ont une mission qui va bien au-delà de la simple défense des intérêts de leurs membres : ils jouent un rôle crucial dans la promotion du bon fonctionnement de l’école et de la qualité de l’éducation. L’initiative constitutionnelle pour la qualité de la formation lancée par Formation Berne/Bildung Bern, avec le soutien de LCH, l’Association faitière des enseignantes et enseignants alémaniques, a abouti avec 20427 signatures valables. Huit autres cantons ont également lancé cette initiative, soutenue notamment par le SER, Radix, le VPOD/SSP (Syndicat du personnel des services publics) et Biblio Suisse.

Le message va dans le même sens que celui de la campagne Goldbach. « La pénurie d’enseignant·es menace la qualité de l’éducation à moyen et long terme, ce qui menace la place économique suisse. En effet, les élèves d’aujourd’hui sont les professionnel·les de demain ! Les coupes au niveau de la qualité de l’enseignement sont donc inacceptables ! »

La société évolue et il faut avancer avec elle, les syndicats s’engagent pour que les enseignant·es travaillent dans de bonnes conditions. Est-ce qu’il suffit d’insister sur les messages d’informations, parce que beaucoup de personnes, notamment les jeunes, ne sont pas bien informées sur les services, les protections et les avantages offerts par les syndicats et les associations ? 

Dans notre société, l’accent est mis sur l’individu, l’intérêt personnel est parfois perçu comme prioritaire. S’ajoute à cela que la transformation numérique impacte les méthodes d’engagement. Les jeunes sont davantage actif·ves en ligne ; faut-il juste savoir adapter les outils digitaux pour capter leur attention ? Un syndicat en ligne ! 

Voici une des conclusions de l’argumentaire de l’initiative constitutionnelle bernoise pour garantir la qualité de la formation :

Le nombre d’enfants et de jeunes à scolariser continue d’augmenter ; un tiers des enseignant·es partira à la retraite dans les dix prochaines années. Sans mesures compensatoires, la pénurie d’enseignant·es s’accentuera. La qualité de l’enseignement est donc également menacée par cette fluctuation.

Ici, il ne s’agit pas seulement d’enseignant·es syndiqué·es, mais d’enseignant·es tout court ! •

Sylvia Despont

Intergénération.ch